Restauration d’un secrétaire Louis XVI estampillé par Charles Topino. D’une forme typique au style de Topino, ce secrétaire est bâti de chêne et de résineux. La façade ouvre par un tiroir et un abattant gainé d’un cuir rouge doré aux petits fers découvrant deux casiers et quatre tiroirs plaqués de bois de rose. La partie inférieure s’ouvre par deux vantaux découvrant une étagère. Ceux-ci sont décorés d’une marqueterie à décor de vase et draperie sur fond tabac, l’abattant quant à lui est marqueté d’instruments de musique, ruban et feuillage sur fond tabac, le tout entouré d’un filet à la grec et filet simples en amarante et sycomore. Les côtés sont plaqués d’une double composition de vases fleuris. Les pans coupés sont à cannelures simulées et le tiroir est composé d’un treillis de filet d’érable teint en vert et de fleurons en buis.
Charles Topino (1742-1803)
Fils de l’ébéniste Henry-Nicolas Topino (fils de Nicolas Topino maitre chapelier)situé Grande rue du Faubourg Saint-Antoine en 1731, Charles naquit en 1742 à Paris. Après avoir travaillé comme ouvrier libre au faubourg Saint-Antoine Charles Topino obtint sa maitrise le 17 novembre 1773, par chef-d’oeuvre du 4 novembre précédent. En 1782 il obtient en reconnaissance de ses qualités individuelles et son travail il est noté à la charge de député de la jurande des menuisiers-ébénistes.
Un artisan pluriel
Reconnu en France et à l’étranger, Topino attire une nombreuse clientèle de marchands-merciers et de confrères ébénistes comme Boudin, Migeon, Jean-Baptiste Tuart, Pierre Denizot, Nicolas Héricourt, ou encore Delorme mais aussi de seigneurs français comme le marquis de Gravelle, pour lesquels il conçoit et livre du mobilier.
Outre son activité de fabrication de mobilier il fut aussi un important fournisseur de bois pour ses confrères telleque : Roger Vandercruse, dit RVLC, Mathieu-Guillaume Cramer, Denis-Louis Ancellet, Fouge, Gober, et Louise Moreau… Il fut aussi acheteur de meuble à ses confrères ( Virrig, Messeclé, Jaques, Simon Guillaume, Jean-Baptiste Tuant, Ohneberg, Pierre, Rocle, Kohl)
Une particularité du livre journal de Charles Topino nous indique la commercialisation et l’export de marqueterie toutes faites. Ont peut y lire la vente de très nombreux lots de marqueteries prêtes à coller à son frère Jean-Baptiste, connu sous le pseudonyme de Lebrund. Ce sont des marqueteries typiques du style de Topino aux modèles d’oiseaux, de chiens, de poterie, d’arrosoirs, de jetons, de cartes à jouer, etc…
Une production innovante et varié
Connu pour avoir laissé son nom dans l’histoire de l’ébénisterie française du XVIIIeme siècle pour avoir produit des marqueteries d’ustensiles à la chinoise, il serait bien réducteur de circonscrire son oeuvre à ce seul apport. L’abondante production de Topino comprend des réalisation variée, révélatrice d’autant de cycles décoratifs dictés par une esthétique très personnelle.
Bonheur du jour, Paris, vers 1770-1775
Bâti en chêne et peuplier ; marqueterie de sycomore, bois de rose, buis, houx ; appliques en bronze doré
H. 89 ; L. 59,5 ; l. 38 cm
Legs par testament olographe Marguerite Jenny Anna Paradis
Inv. 32125
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
Ses marqueteries, décorées de vases de fleurs, écritoires et divers ustensiles, tels que des tasses, des théières, des jattes – présentées à la manière de natures mortes – ou encore des cartes de jeux et des livres constituent les éléments les plus caractéristiques de ses meubles. Elles s’inspirent le plus souvent des bordures de paravents chinois en laque de Coromandel qui emploient ces mêmes motifs. Réunis dans un compartiment ovale, rond, carré ou disposés en frise, les décors sont très généralement vus de profil et leur découpe, très simple, nécessite un petit nombre de morceaux de bois repris au burin pour les détails. Parmi les tables à gradin, autrement dits bonheurs-du-jour, il réalise principalement ses modèles sous une forme classique, de plan rectangulaire mais aussi quelques modèles de forme ovale qui constituent une nouveauté du genre qu’il affectionne particulièrement. Fréquemment ovales, elles aussi, les tables marquetées d’objets usuels comportent, dans la plus grande partie des modèles, un tiroir au centre de la ceinture et, sur les côtés, deux petits tiroirs qui pivotent.
Table en chiffonnière
Peuplier et noyer plaqués de bois de rose, amarante, houx, alisier, bronzes ciselé et doré.
Inv. CAM 349
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
A côté de ces décors originaux, Charles Topino a aussi pratiqué les marqueteries de fleurs et de paysages. Les premières apparaissent en plus grand nombre sur les meubles Louis XVI. Les secondes, aux scènes champêtres, dans le goût chinois ou d’architectures, ornent plus fréquemment des petites tables tambour rondes, sur trois pieds galbés.
Malgré une belle carrière, la mauvaise gestion entraînée par la mauvaise tenue de ses livres de comptes et la Révolution contraignent Charles Topino à mettre la clé sous la porte le 21 décembre 1789.
BIBLIOGRAPHIE
- Charles Topino – Les Cahiers du Mobilier – Sylvain Barbier Sainte Marie – Les Editions de l’Amateur – 2005
- Le Mobilier Français du XVIIIème Siècle – Pierre Kjellberg – Les Editions de l’Amateur – 1989
- Les ateliers parisiens d’ébénistes et de menuisier aux XVIIe et XVIIIe siècles – Guillaume Janneau – Éditions Serg – 1975
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Constat d’état
Quelques petits soucis importants pour ce secrétaire. Le vernis cellulosique appliqué sur ce meuble avant fortement chanci et jauni, des couleurs (fuchsine) vertes, marron, rouget avaient été appliqué sur ce vernis d’ancien greffes de placages teintés ne permettaient plus une bonne lecture des marqueteries. Côté structure plusieurs fentes étaient visibles sur l’abattant et les panneaux de côté se décollaient des montants arrière ce qui engendrait un mauvais maintient du meuble et des fentes apparentes.
La restauration
Il est toujours gênant de dé-restaurer, mais il est vrai que parfois cela semble évident. Surtout lorsque l’on trouve du scotch double face en contre parement d’une ancienne greffe de placage.
La restauration a donc consisté à retirer en premier lieu l’ancien vernis cellulosique qui ne permettait pas de voir l’étendue du travail à réaliser sur ce secrétaire. Après décapage nous avons constaté que une grande partie des greffes d’une précédente restauration avaient été réalisées avec de placage de hêtre au lieu du sycomore. que ce soit pour les fonds tabac que pour les pièces de marqueterie.
Mais la bonne surprise fut de découvrir des belles couleurs vertes pour les feuillages et même un très joli bleu pour les fleurs.
Il a donc été décidé re refaire les anciennes greffes de placage par des bois de placages scié, raclé et poncé avant collage puis mis à la bonne épaisseur en contre parement afin de ne pas avoir à toucher à la patine du meuble.
Il était malheureusement évident que certaines greffes du fond tabac, comme celle en bas à gauche de l’abattant, seraient extrêmement difficile à faire disparaitre à cause de leur emplacement et de la difficulté de trouver un bois avec la même maille et le même fil.
Pour les tiroirs et le côté haut droit, le fond du treillage en hêtre a été retiré sans toucher aux filets verts et aux fleurons en hêtre avant d’être remplacé par un nouveau fonds de sycomore tabac et cela sans racolage ni ponçage bien entendu.
Après avoir été rempli à la ponce, les greffes ont été oxydées. Puis après la première couche de vernis au tampon incolore, les gravures ont été reprise au marqueur afin de recréer l’aspect décoratif de celles-ci sans avoir un toucher au placage. Une grande partie du maillage des greffes de fonds a été réalisée en réintégration chromatique (ou dramatique comme dirai mon confrère Hugues!) afin de les intégrer les plus parfaitement possibles. Quelques perces ont également été traitées de la même façon
Les bronzes ont quant à eux été doré par la maison ARTE à Paris.
