Cette semaine je vous présente une commode Louis XIV de la première moitié du XVIIIeme siècle en placage de palissandre de Rio et avec des garnitures de bronzes au chinois.
Haut. : 85,7 cm, Larg. : 125 cm, Prof. : 60,5 cm
Le bâti est en résineux, en planches assemblées à plat joint. Les assemblages des côtés, du dessus et du dessous, sont à queues d’arondes. Le dos est constitué de plusieurs planches cloutées dans les feuillures des côtés.
Les fonds et côtés de tiroir sont constitués de planches de noyé collées entre elles à plat joint. Ils sont dits » à fond rampant ». C’est à dire que la totalité du fond du tiroir coulisse sur la totalité du faux fond qui constitue également les traverses de façades.
Louis XIV et la Chine
C’est entre 1681 et 1683 qu’un projet d’envoyer des missionnaires en Inde et en Chine prend forme à l’initiative de Colbert et du Père Jean de Fontaney.
C’est à la suite du 15 septembre 1684 et de la réception fastueuse à Versailles du jésuite flamand, le père Philippe Couplet, qui avait passé de nombreuses années en Chine et qui venait chercher de l’aide pour renforcer les missions jésuites, que Louis XIV convaincu par ses arguments, envoya en Chine en 1685 sur sa cassette personnelle, six Jésuites français.
Aux XVIe et XVIIe siècles, les compagnies des Indes portugaises puis néerlandaises s’étaient chargées de diffuser en Europe des objets chinois que les marchands français achetaient à leur tour pour leur propre clientèle.
Cet attrait pour les productions de la Chine fut renforcé en 1686 par la réception des ambassadeurs, envoyés à Louis XIV par le roi de Siam. Ces derniers, reçus fastueusement dans la galerie des Glaces, couvrirent Louis XIV de cadeaux. Parmi-eux, figurait de nombreux objets chinois, notamment des porcelaines, des étoffes, des papiers peints et des meubles en laque, qui séduisirent la cour.
À Paris, le commerce du « Lachinage » ou de « Lachine » était essentiellement détenu par les marchands merciers dont le plus célèbre, dans la première moitié du XVIIIeme siècle, fut Edme-François Gersaint qui n’hésita pas à débaptiser son magasin Au grand Monarque en un plus exotique À la Pagode.
Considérés officiellement comme des scientifiques, il n’en reste pas moins que ces missionnaires étaient des ambassadeurs culturels officieux, les fers de lance de la politique française dans cette région du monde qui permirent l’arrivée des premiers marchands français en 1698.
C’est ainsi qu’à partir du début du XVIIIème siècle la mode du goût de la chine et des chinoiseries prit son envole et dura jusqu’à la fin du siècle.
Constat d’état
La commode était en assez bon état, il n’y avait que trois petits manques de placage et une déshydratation générale des colles sous le placage. La structure était en très bon état, exceptée une légère déformation du plateau mais tout a fait acceptable car elle n’entraînait pas de dégâts esthétiques disgracieux. Non, le plus gros souci était le vieillissement du vernis et cet aspect jaunit désagréable. Il y avait quelques greffes de placage dues à des restaurations, ou pas. Elles peuvent être en effet d’origine et ne gène en rien la lecture du meuble.
La restauration
La restauration a donc consisté à réhydrater l’ensemble des colles par infiltration et une mise sous presse avec un léger apport de chaleur. Ce qui a permis de ré-aplanir l’ensemble des surfaces plaquées et ainsi éviter un ponçage mécanique et de sauvegarder l’oxydation du bois. En effet, lorsque l’on retire cette oxydation par un ponçage, le palissandre retrouve sa couleur d’origine qui est très foncée et qui fait perdre toute la beauté du palissandre ancien. Les greffes de placage ont été réalisées avec du placage scié, raclé et poncé avant collage à la colle chaude.
Le vernis a ensuite été régénéré et retravaillé au vernis Roubo au tampon. Les bronzes ont été nettoyés avec une solution d’EDTA dilué et du bois de Panama.
Pour voir les restaurations précédentes : https://ebenisterie-mathieuvath.fr/en-ce-moment-a-latelier/