Cette semaine, retour sur la restauration d’une commode d’époque Louis XIV, une commode dite Mazarine. Mais d’ou vient ce nom de « Mazarine » ?
Et bien il semblerait qu’un exemplaire ai été fabriqué la première fois pour la fameuse bibliothèque Mazarine, tout simplement.
D’ailleurs, l’illustre créateur de la commode, n’est autre que, André Charles Boulle, lui même. Pour la chambre de Louis XIV à Trianon, il révolutionne en 1708 une forme de meuble : la commode, qui tient son nom du côté « pratique » comparé aux coffres qui étaient largement employés à l’époque. Aujourd’hui présentées à Versailles, les deux commodes du roi résument à merveille l’art de Boulle : originalité du meuble dans son principe et sa forme, marqueterie de cuivre et d’écaille, abondance des bronzes. Elles sont, de surcroît, les rares meubles identifiés de son immense production.
Mais retournons à notre commode. Celle ci doit probablement dater du milieu XVIIIe siècle. Le corps est en conifère assemblé à queues d’arondes, et elle est plaquée d’olivier, de poirier noirci, d’épine vinette, de buis et d’érable sycomore. Les entrées de serrures et les sabots en pied de biche sont dorés au mercure.
Sur cette commode, il n’a pas beaucoup de travail sur le placage ni sur la boiserie. Elle a sûrement dû être restaurée il y a déjà quelques années. Mais c’est en décapant la grosse épaisseur de vernis cellulosique qui avait blanchi avec le temps que les dégâts sont apparus.
On peut très bien voir sur cette photo toutes les perces ,dû à un ponçage excessif, dans le poirier noirci.
Mais pourquoi ces perces se trouvent elles uniquement dans le poirier noirci?
Et bien il faut savoir que cette commode a été plaquée au marteau. A cette époque l’ ébéniste a commencé par plaquer le fond en poirier noirci, puis le frisage en olivier. Et c’est après, qu’il a incrusté les motifs de marqueterie, prédécoupés à la scie à chantourner, avec un couteau à marqueterie. Et ensuite il a raclé, poncé à la peau de chien de mer et à la lime douce, pour enfin polir le meuble.
Donc, le fond en poirier noirci se retrouve légèrement en sous épaisseur, et lors du ponçage du meuble lors des précédentes restaurations la catastrophe est arrivée.
Ce qui nous permet de très bien voir les traces de rabot à dents qui sont très larges. Cela nous donne un bon indice sur l’époque de conception de ce meuble.
Donc, la restauration a consisté à redonner de la lisibilité à la marqueterie en reconstituant les quelques manques qui ont disparu à cause de la perce. Et pour ne pas engendrer plus de dégradations, il a été choisi de simplement retinter le poirier noirci avec une teinte à l’eau.
De plus un des deux personnages, sur la marqueterie centrale du plateau avait quasiment entièrement disparu. Il a donc été décidé de le reproduire entièrement sur la base des éléments que l’on pouvait encore observer.
Bonjour,
Au fil des insolations et/ou décapages et revernissages on arrive -hormis pour les teintes noires- à des nuances allant du jaunâtre au marron et parfois dans le meilleur des cas au marron rouge amarante. Particulièrement pour les bouquets je me demande s’il n’y avait pas plus de couleurs ou plutôt de teintes rapportées sur les marqueteries. J’aimerais avoir votre avis et si possible des exemples de restaurations allant dans ce sens.
Bonjour, oui, il y avait plus de couleurs. Les bois n’étaient pas teintés en surface après placage. Mais ils avaient soit leur couleur naturelle, qui peut être très vive, comme pour le padouk par exemple. Ou bien ils étaient teintés en bleu, rouge, et le plus souvent en vert. Mais sous l’effet principal des UV et de la lune le bois se trouve oxydé et perd en surface sa couleur, pour aller vers un camaïeux de marron. C’est lors de la dépose du placage que l’on peut admirer en contre-parement la splendeur des couleurs d’origine.
Pour vous rendre compte de l’état des couleurs d’un meuble ancien, je vous renvoie vers un article du musée des arts décoratifs traitant de la reproduction du secrétaire à cylindre de J.F Oeben se trouvant au musée Nissim de Camondo.
https://madparis.fr/francais/musees/musee-nissim-de-camondo/expositions/archives-986/exposition-dossier/la-replique-d-un-chef-d-oeuvre-le/
En espérant avoir répondu à votre question.
Mathieu VATH